Société
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La confirmation jeudi de la condamnation de l'ex-président libérien Charles Taylor à 50 ans de prison pour crimes contre l'humanité lors de la guerre en Sierra Leone a suscité des réactions de soulagement et de joie à Freetown, selon un journaliste de l'AFP.
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Dans la capitale sierra-léonaise, plusieurs dizaines de personnes ont suivi à la télévision l'annonce du verdict, retransmise en direct depuis les Pays-Bas où Charles Taylor a été condamné en première instance par le Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL) à 50 ans de prison, une peine confirmée en appel jeudi. Ce jugement marque la fin d'un procès qui dure depuis plus de sept ans. La décision a été accueillie généralement avec soulagement et joie, sans donner lieu à des excès. Les rues sont demeurées calmes. "En tant que gouvernement, nous croyons que justice a été rendue, et que l'impunité est révolue", a déclaré à l'AFP un porte-parole adjoint du gouvernement, Abdulai Bayraytay. Selon lui, "le message pour les chefs d'Etat actuellement au pouvoir, pas seulement en Afrique mais aussi en dehors, c'est que vous devez exercer le pouvoir judicieusement, respecter l'Etat de droit et les droits de l'Homme et défendre la dignité d'autrui". "Je suis heureux de l'issue" du procès en appel de M. Taylor, s'est réjoui Sullay Turay, un amputé d'une main et d'un pied durant la guerre, qui n'a pas voulu rater l'énoncé du verdict. Cela "montre que quoi que vous fassiez, la justice vous rattrape finalement et c'est ce qui s'est passé dans le cas de Charles Taylor", a-t-il dit à l'AFP. En Sierra Leone, la guerre civile (mars 1991-janvier 2002) a été marquée par les atrocités commises par les combattants, souvent drogués, contre la population civile. Il y a eu 120.000 morts et des milliers de civils mutilés. "Que Taylor croupisse en prison!", s'emporte Andrew Lebbie, un chauffeur de taxi, à l'annonce de la décision du TSSL. "J'espère seulement qu'il purgera sa peine dans une prison africaine, pour qu'il souffre encore plus!", s'est-il exclamé. Le procès de Charles Taylor avait été délocalisé de Freetown à La Haye pour des raisons de sécurité. Pour Ibrahim Tommy, président d'une ONG sierra-léonaise de défense de l'Etat de droit, "la justice a été pleinement rendue, et les victimes" de la guerre en Sierra Leone "doivent maintenant aller de l'avant dans leur vie". "Les violences qu'elles ont subies ont été abordées lors de la procédure judiciaire. Le gouvernement doit maintenant travailler à renforcer le système judiciaire et travailler pour la réinsertion sociale et économique des victimes, a estimé M. Tommy. Quelques Sierra-Léonais se sont cependant montrés indifférents, voire critiques, après la décision du TSSL. L'affaire Charles Taylor est "une affaire oubliée pour ma famille et moi", affirme Felix Garber, comptable. "Ce qui nous préoccupe, c'est d'avoir à manger sur la table et le coût élevé de la vie en Sierra Leone actuellement", a-t-il expliqué. Pour un vendeur de tissu qui s'est seulement identifié par son prénom, Bernard, la TSSL a eu la main lourde. "La sentence demeure plutôt élevée, compte tenu de la durée du procès", a-t-il estimé. Charles Taylor, 65 ans, avait été reconnu coupable en avril 2012 d'avoir aidé et encouragé une campagne de terreur visant à obtenir le contrôle de la Sierra Leone. Sa peine avait ensuite été fixée à 50 ans de prison alors que l'accusation en réclamait 80. "Le pardon est tout ce que je demande. Le tribunal aurait dû tempérer la justice avec de la clémence", a dit un pasteur, le révérend Sam Fergusson.
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